L’indépendance, l’objectivité, la neutralité et l’éthique journalistique sont mises à mal dans le documentaire « Les nouveaux chien de garde ». Il est diffusé jusqu’au 28 février au cinéma l’Utopia à Toulouse. Un pamphlet moderne qui lève le voile sur une manipulation quotidienne.
« Assis, couché, debout ! » Ce documentaire dénonce l’obéissance des chiens de garde, ces gardiens de la liberté. Ainsi, une série de journalistes, d’experts et de patrons de presse sont montrés du doigt. Au fil du film, une voix OFF livre des passages de l’ouvrage des « Chiens de garde », de Paul Nizan publié en 1932. A croire que ses phrases n’aurait pas pris une ride.
L’objectivité bafouée
« Objectivité ne signifie pas impartialité mais universalité » a écrit le sociologue Raymond Aron. C’est ce que cherche à prouver le film de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat. Selon eux, l’objectivité est la grande absente des médias. En effet, les liaisons dangereuses entre les grands patrons et les journalistes influenceraient le traitement de l’information expliquent ils. Anne Sinclair et Dominique Strauss-Khan ou Bernard Kouchner et Christine Ockrent en sont les exemples les plus médiatiques. Comment rester objective alors que l’on partage les intérêts de son époux ? La question est posée par les réalisateurs.
D’autres liaisons sous-jacentes émergent entre les patrons de rédaction et les hommes politiques. Les soi-disant questions impertinentes de Laurent Joffrin à Nicolas Sarkozy n’en seraient pas. Face à ces accusations, le directeur de la rédaction du Nouvel Observateur a réagi de manière virulente. Selon lui, le film est « plein de clichés et d’amalgames ».
Pourtant un club réunit les membres les plus influents de la classe dirigeante française chaque premier mercredi du mois: le Siècle. Homme politiques, économistes, patrons de presse, grands industriels et journalistes vedettes s’y retrouvent. En toute objectivité, bien sûr.
Les experts, nouveaux BIG BROTHER
Ce manque d’impartialité se combinerait à l’intrusion médiatique des experts. Une trentaine d’entre eux sont présents sur les plateaux ou dans les tribunes depuis des dizaines d’années. Et notamment Jacques Attali, Michel Gaudet ou Daniel Cohen. Ils ne diffuseraient qu’ un « message unique » : défendre les vertus du marché capitaliste. Plus que cela, les réalisateurs insistent sur le fait que la majorité d’entre-eux est actionnaire ou conseiller dans les plus grandes banques et sociétés privées françaises.
En nous montrant cette version des faits, le film nous fait nous poser une question. Ou est alors passé le sens critique ? Il est laissé hors de porté des médias selon le documentaire. Ce pamphlet des temps moderne dénonce l’influence des puissances économiques et médiatiques. A travers de nombreux exemples, les réalisateurs révèlent que l’information aurait perdu tout contact avec le pluralisme et l’indépendance qu’elle souhaite incarner. Le temps où Alain Peyrefitte, ministre de l’information, venait présenter la formule du JT ne serait pas si « antique ». De manière détournée, les puissants joueraient avec leurs marionnettes. En cela, le film est une dénonciation virulente de l’assujettissement des grands médias. Et notamment de la connivence entre les journalistes vedettes et le monde politico-financiers.
L’analyse de Bourdieu est ici re-visitée. Comme le sociologue, les réalisateurs cherchent à engager une réflexion sur les médias Dans son ouvrage « Sur la télévision », la tension entre journalisme « pur » et « commercial » est exacerbée. Aujourd’hui encore Christine Ockrent va jusqu’à faire des « ménages », en se faisant rémunérer pour vanter les mérites de Microsoft. L’éthique journalistique serait-elle bafouée ? « Les nouveaux chiens de garde » appelle le public à user de sens critique.
« Les nouveaux chiens de garde » est diffusé jusqu’au 28 février 2012 à l’Utopia de Toulouse et à Tournefeuille.