« Justice et économie : doctrines anciennes et nouvelles théories» tel sera le thème des journées d’étude organisées par l’Université Toulouse 1 Capitole (UT1) qui se dérouleront du 16 au 18 juin prochain. Voilà plus de vingt ans, Amartya Sen faisait le constat selon lequel la pensée économique essayait de développer son autonomie épistémologique en s’émancipant de l’autorité de l’éthique. Cependant, les économistes reconnaissent de plus en plus que la dimension positive de la théorie économique n’exclut pas nécessairement la dimension normative et qu’une des conditions du progrès des connaissances économiques réside dans une recherche interdisciplinaire pour inventer de nouveaux modes de complémentarité entre ces deux dimensions.
Près d’une centaine d’intervenants réfléchiront à la place de la justice dans la réflexion économique concernant des domaines extrêmement variés. En effet, la justice et la dénonciation des injustices ont toute leur place dans les grands débats contemporains, à l’instar de l’engagement du prix Nobel Amartya Sen pour le développement, contre les discriminations liées au genre et pour la préservation du climat.
Le 18 juin une excursion sur les traces d’Adam Smith permettra de retrouver sur place les éléments que le père de l’économie politique avait retiré de son séjour de deux ans à Toulouse (1763-1764) pour son Enquête sur les causes de la Richesse des Nations (1776).
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Prix Nobel d’économie 1998, l’économiste Amartya Sen, est l’un des intellectuels indiens les plus connus et les plus respectés.
Né en 1933, à Santiniketan, à l’ouest du Bengale (Inde), Amartya Kumar Sen a fait ses études à Dhaka, ville dont sa famille est originaire et qui est devenue plus tard la capitale du Bangladesh. En 1947, au moment de la partition de l’Inde, il émigre avec sa famille vers la partie indienne du Bengale. Cette année-là, il est le témoin d’une terrible famine qui décime plus de 3 millions de Bengalais. Amartya Sen poursuit ses études à l’université de Calcutta (Inde), puis au Trinity College, Cambridge (Royaume-Uni).
Il commence à enseigner en Inde, à Calcutta et à New Delhi. Il enseigne ensuite à la London School of Economics, Oxford, Harvard et au Trinity College de Cambridge dont il est le recteur à la fin des années 1990. En 2004, il reprend ses enseignements en économie et en philosophie à l’université d’Harvard (États-Unis).
Les travaux de Sen, qui ont marqué la fin des années 1960 et le début des années 1970, ont aidé à développer la théorie du choix social, grâce à ses intérêts pour l’histoire de la pensée économique et de la philosophie.
En 1981, il publie «Poverty and Famines : An Essay on Entitlement and Deprivation», un livre dans lequel il démontre que les famines ne sont pas seulement dues au manque de nourriture mais aussi aux inégalités provoquées par les mécanismes de distribution de la nourriture.
Quand il reçoit le prix Nobel d’économie, en octobre 1998, cette distinction est attribuée pour la première fois à un économiste issu du tiers-monde et spécialiste internationalement reconnu des questions de développement.
Dans son dernier livre, il s’écarte des théories de la justice qui veulent définir les règles et les principes qui gouvernent des institutions justes dans un monde idéal. Sen s’inscrit dans une autre tradition des Lumières, portée par Smith, Condorcet, Marx et Mill : celle qui compare différentes situations sociales pour combattre les injustices réelles. «L’idée de justice» représente l’aboutissement de cinq décennies de travail et de réflexion, mais aussi d’engagement dans les affaires du monde.
Photo DP/International Institute of Social History in Amsterdam, Netherlands : Karl Marx en 1875