Avec une semaine d’avance sur la Semaine du cerveau officielle (du 11 au 17 mars), le Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse offre au public du dimanche 3 mars (jour de gratuité), la possibilité d’échanger avec une trentaine de scientifiques dont l’objet de recherche est le cerveau. Si le public se pose parfois des questions sur sa capacité à comprendre le vocabulaire des spécialistes ou les « données savantes », qu’en est-il des interrogations des scientifiques lâchés dans l’arène de la vulgarisation? Constandina Arvanitis, chercheuse au Centre de Biologie du Développement, au CNRS, et Julien Lassus, doctorant dans le même laboratoire, ont livré leurs impressions sur cet exercice de communication particulier.
Constandina, Dina pour son entourage, est en France depuis 2007. Cette Canadienne de Toronto a le sens du Service public, elle attaque tout de go: « Je suis chercheuse, je suis payée par l’Etat, je me dois d’aller vers le public! » Même si pour le « Kiosque », il lui faudra parler d’autre chose que de ses travaux de recherche actuels. « Nous travaillons, habituellement, sur les processus de développement du cerveau et sur la mise en place du système nerveux… Et là, nous allons présenter l’évolution du cerveau. » Tous deux clôtureront la rencontre de ce Kiosque « spécial Cerveau » par une rencontre qui permettra — peut-être — au visiteur de faire une synthèse des différents ateliers proposés. Le fait d’aborder des notions générales plutôt que de parler de secteurs très pointus les a obligés à se documenter. « Comme nous cherchons des informations en permanence… C’est notre métier… Ça n’a pas été trop difficile de trouver des informations sur ce qui va intéresser le public », confie Dina. Julien sourit et tape sur le clavier de son ordinateur; il explique qu’il a, notamment, fait des recherches concernant le nombre de neurones des cerveaux de certains animaux: « L’abeille en a 100.000 fois moins que l’Homme… », mais, le 3 mars, il pourra répondre ce qu’il en est pour la souris, mais aussi pour l’éléphant ou le dauphin… Ces animaux ne sont pas les modèles classiquement étudiés par les chercheurs. La drosophile (petite mouche noire), le xénope (un amphibien), le poisson zèbre, les poulets et les œufs et, bien sûr, la souris sont plus souvent sollicités. Pour appuyer leurs explications, un matériel simple: des moulages reproduisant les cervaux de différentes espèces et des microscopes où l’on pourra regarder des préparations de cellules de cerveau.
Julien, qui pense que l’exercice du Kiosque est extrêmement formateur, affirme qu’il sera nécessaire de redéfinir quelques termes: synapse, transgénèse… mais que globalement, avec les facilités initiées par Internet, la plupart des visiteurs ont de bonnes notions de base. « Certaines mises au point seront néanmoins utiles car, parfois, les médias diffusent des approximations qui peuvent induire en erreur. Notre challenge sera de donner les mots justes en un minimum de temps. »
Très intéressé par la vulgarisation, le doctorant devrait être dans son élément face à un public non-initié, puisque, sur les quelques cours obligatoires en thèse, il a justement choisi un module « vulgarisation scientifique ». « Apprendre à rendre simple des idées complexes, poursuit-il, voilà un but important pour un chercheur. » Dina surenchérit: « C’est aussi l’occasion de montrer l’importance de la science. En général, on ne s’expose pas et peut-être que les gens ne savent pas ce que l’on fait. » Elle ajoute, mi-figue, mi-raisin: « Il y a une question que l’on ne pose qu’en France: Vous êtes chercheur? Est-ce que vous avez trouvé? C’est étrange, non? »
Le Kiosque sera sans doute l’occasion de créer une passerelle entre deux mondes qui se méconnaissent. Les deux chercheurs sont conscients d’appartenir à un cercle fermé qui effectue des échanges entre pairs, « ce Kiosque est l’occasion d’ouvrir le cercle, de rencontrer des naïfs qui posent de bonnes questions. » Pas de stress donc pour ceux qui vont consacrer un dimanche au public.
Arielle MONTAUREL